Objet urbain emblématique du nord de la métropole grand-parisienne, la tour Obélisque est tout autant un symbole de l’architecture glorieuse des années 1970 que celui des grandes copropriétés dégradées d’aujourd’hui. Cela en fait un double symbole de notre histoire urbaine et sociale. Edifiée peu avant le vote de la loi définissant et régissant les immeubles de grande hauteur (IGH) sur le plan de la sécurité incendie, la tour, haute d’une centaine de mètres, a subi de plein fouet l’explosion des charges induite par la mise en application du texte en 1977. Ce dernier impose, pour tout projet d’habitation proposant des logements à plus de 50 m au-dessus du niveau du sol, d’intégrer sur place du personnel de sécurité, ainsi qu’un coûteux protocole de maintenance.
La copropriété n’a cessé depuis d’accumuler les dettes et s’est montrée incapable de maintenir le bon état du bâtiment. Son évacuation en urgence fin 2021, à la suite d’un arrêté de mise en péril émis par la préfecture de Seine-Saint-Denis, l‘a définitivement faite basculer du côté des bâtis obsolètes. Désormais vide, le bâtiment n’en reste pas moins le phare du quartier d’Orgemont à Epinay.

Notre projet prend pour point de départ la réduction des coûts très élevés induits par la réglementation IGH tout en maintenant la dimension habitée de la tour. Nous proposons donc de conserver la programmation résidentielle des 17 premiers niveaux (culminant à 48 m) en y intégrant une résidence intergénérationnelle et des colocations étudiantes, mais de faire évoluer la partie haute de la tour en une centrale solaire afin d’échapper au champ règlementaire IGH.

Les panneaux photovoltaïques composant la centrale sont ajoutés en toiture et en façade sur les 13 derniers niveaux : ils sont un moyen supplémentaire de réduire les charges des futurs habitants, mais aussi de projeter le monument dans l’ère du temps. La grande hauteur – assurant une bonne exposition des façades par l’absence de vis-à-vis – n’est plus une contrainte mais un atout.

Réinventer la tour Obélisque c’est aussi repenser son rapport au sol. Le bâtiment occupe une position sur dalle déconnectée par endroits de l’espace public environnant. Son parking souterrain, aujourd’hui bien trop grand, peut être creusé et transformé : la partie excédentaire est l’occasion de développer un petit équipement de quartier capable d’attirer un public nouveau et de raccorder le parvis de la tour avec le reste du secteur.

Le projet n’est pas une simple rénovation mais se veut être un véritable plaidoyer pour la sauvegarde des bâtiments exceptionnels construits au début des années 1970. Conscients de la valeur patrimoniale de la tour, nous souhaitons conserver ses lignes et le dessin de son enveloppe en minimisant les interventions sur la structure existante. L’ossature porteuse de la tour ainsi que son principe de façade sont donc conservées. La centrale solaire confère néanmoins au projet une forte dimension expérimentale. Aux systèmes de captation solaire pourront d’ailleurs être adjoints des dispositifs nécessitant une position élevée et dégagée : capteurs météorologiques et autre sonde sur la qualité de l’air. Ils sont autant d’éléments qui participeront à redessiner l’image de la tour, aujourd’hui liée au choc de l’éviction des habitants, et à esquisser, pour cette dernière, un avenir plus désirable.